17/06/2010 | Mission: La robe ! Ou comment déshabiller l'histoire!
crédit photo: Eric Dell'Erba
Le cartel d'instroduction à mon installation pour l'exposition La robe mission, un art de la rue?
Mission : La robe !
Ou comment déshabiller l’histoire
L’histoire de la robe mission
La robe mission a été inventée pour couvrir la peau, les courbes de la femme d’Océanie, celle qui, à l’arrivée des premiers marins européens, était nue ou presque...
Une mission sous couvert de moralisation qui n’est en vérité que dénigrement voire diabolisation alors que la femme est le véritable refuge-réconfort de l’homme. La meilleure preuve en est que la majorité de la population en Nouvelle-Calédonie aujourd’hui est métissée.
Toute cette « histoire » alors que l’homme occidental avait à l’époque enfin retrouvé son Eve : Belle et accueillante, elle se donnait à lui parce qu’elle le prenait à tort pour étant de cette race divine tant attendue et croyait s’offrir à elle-même une descendance du même ordre. Quoi de plus « naturel » ?
Lui en redevenait par hasard et sans mérite aucun Adam, le premier homme, sa décharge y prenant au passage la gloriole de la conception d’un « genre nouveau », et surtout : Il avait enfin retrouvé le paradis.
Les missionnaires et la chrétienté coloniale ont agi doublement pervers : Ils ont fait coudre en Europe des robes mission par les femmes occidentales pour qu’elles participent à « l’œuvre civilisatrice » envers les femmes « noires et sauvages » en les habillant (ces pauvrettes blanches qui en réalité étaient probablement bien moins libres que les femmes en Océanie). Par la même occasion et à l’autre bout du monde, ils ont « déclassé » la femme océanienne dans la catégorie des filles faciles (robe mission, robe popinée, popinée le « pot » pour la pine ?) qu’il fallait habiller.
Le mot d’ordre était de dé-rober au regard du marin, agneau de dieu, ces boutons roses exhibés le plus naturellement du monde (car c’est bien par elles que toute vie humaine prend vigueur). De ce point de vue d’ailleurs, ce serait bien la femme en niqab, la plus vertueuse de toutes au sens « chrétien », et l’on se demande pourquoi diable, on en fait tout un beans aujourd’hui, en Frônce métropolitaine.
En passant ces mâles « vertueux » ont détruit sans vergogne, comme sur l’île d’Erromango, une culture vestimentaire féminine très élaboré, un habit qui a en sophistication rien à envier aux parures chatoyantes portées à la cour de Luis XIV...
Mais cette robe à la « mission » au départ masculine, même si on ne peut pas nier la complicité des femmes occidentales à penser ainsi libérer la femme océanienne d’une nudité qu’elles jugeaient dégradante, qu’est ce qu’elle est devenue aujourd’hui ?
Un matériau significatif et vivant qui évolue en permanence, une affirmation et une revendication, une histoire océanienne ancienne déjà et à écrire encore, un plaisir à regarder avec ces milles tissus et nuances dans la coupe :
Tant mieux ! ... Et tant pis pour celles qui n’en portent jamais.
L’histoire du Bikini
A contrario de la robe mission, le bikini a été inventé pour dénuder la femme le plus possible sans toutefois la mettre totalement à nu. Et cette histoire-là, finalement, n’est pas moins perverse :
Louis Réard inventa le bikini et le présenta pour la première fois à Paris le 5 juillet 1946 à la piscine Molitor porté par Micheline Bernardini, une célèbre danseuse nue du Casino de Paris. Il déclara avoir choisi le nom de Bikini en référence à l'atoll du même nom sur lequel, cinq jours auparavant, avait eu lieu une explosion nucléaire. Il espérait que l'effet de mode de ce nouveau produit serait comparable à celui de l'explosion qui venait d'avoir lieu : Quel sens de la publicité, quelle bravoure coloniale là encore !
Ce coup-ci, il va sans dire, les choses se sont passé sans la complicité du clergé : En 1951, et sous un flot d’injures, le journal du Vatican Osservatore Romano annonce même que les Chevaliers de l’Apocalypse apparaîtront sans doute en bikini.
Pourtant une femme qui s’habillerait de sa version monokini et dans une collection qu’on imagine cousue dans un tissu « imprimé feuille de vigne » ressemblerait à s’y méprendre à cette Eve des tableaux moyenâgeux et devrait plutôt être considéré comme une promesse paradisiaque !
La vraie Histoire
Mais tout ce qui est écrit ci-dessus, c’est ce qu’une partie de l’histoire...
La vraie Histoire de la robe mission et du bikini est une autre, une histoire qui, au-delà du colonialisme et de la rencontre entre deux civilisations plutôt mal entamée (car les uns se prenaient pour supérieur aux autres) est liée à un fait simple et maintenant confirmé :
Le réchauffement de la planète !
Miriam Schwamm
Nouvelle-Calédonie
Mai 2010
Mission : The dress !
Or how to undress history
The story of the Mission Dress (Mother Hubbart dress)
The Mission Dress was invented to cover up the flesh and curves of the Oceanian women, who, when the first European seafarers arrived, were still going around naked, or almost…
Under the guise of raising moral standards, this mission in fact only denigrated and even demonized women, who at the same time provided a true refuge and comfort to the men. The best proof of this is that the majority of New Caledonia’s population today is mixed-blood.
Such a long “tale”, because European man was able to finally find his Eve: beautiful and welcoming, she gave herself to him because she mistakenly thought he was from an eagerly-awaited divine race and believed her offspring would inherit the same qualities. What could be more “natural”? Arriving here, becoming by chance and undeservingly an Adam, as a bonus he took credit for producing a “new race” … and above all, he had at last found paradise.
The missionaries and the colonial Christians were doubly perverse: they organised for the mission dresses to be made in Europe by the women there, who were able to participate in a « civilising action», that of dressing the « black, savage » women (although these poor little white women probably had less freedom than their Oceanian sisters). At the same time, and at the other end of the earth, they were “downgrading” the Oceanian woman, putting her into a category of “easy” (mission dress, known as a ‘popinée’ dress, with a play on words crudely translating into a pot for a cock to enter) who must be made to wear clothes.
The watchword, in regards to the seafarers, those lambs of God, was to cover these rosebuds who showed themselves in the most natural way in the world (as isn’t it from women that all human life springs?). Elsewhere in the world, this vision would result in women having to wear a niqab (face veil) so that she would be considered a truly virtuous woman in the “Christian” sense, which makes one wonder why on earth there is such a scandal about this today in metropolitan “Frônce”.
These « virtuous » men shamelessly destroyed, in Erromango for example, a culture of complex feminine clothing, which, in terms of sophistication, was more than equal to the finery worn at the court of Louis XIV…
But returning to the “Mission” Dress, first created by men and aided by European women who felt that Oceanian women would be liberated from their degrading nakedness, what has this dress become today?
It’s a significant, living material which is constantly evolving, a declaration and reclamation, an ancient Oceanian history, already written and not yet finished, a pleasure to contemplate with its metres of fabric and its nuances in the design.
All the better! … and too bad for those who never wear it!
The history of the Bikini
In total contrast to the mission dress, the bikini was invented as a means to undress women as completely as possible without them actually being totally naked. And this story is no less demeaning:
Louis Réard invented the bikini, introducing it for the first time in Paris on 5 July 1946 at the Molitor pool, where it was worn by Micheline Bernardini, a famous nude dancer from the Casino de Paris. He claimed to have chosen the name in reference to the atoll of the same name where experimental atomic bombs had been detonated five days earlier. He hoped that the reaction to the new product would be as earth-shattering as the explosions coming from Bikini atoll: what a sense of advertising, what colonial courage shown yet again!
Naturally, this all happened without the Church’s approval: In 1951, and whilst letting forth a stream of abuse, the Vatican’s Osservatore Romano newspaper cuttingly announced that even the Horsemen of the Apocalypse would appear, no doubt, in bikinis.
The monokini, however, is small enough to be a fig-leaf, and if its material were fig-leaf patterned, the woman wearing it would definitely look like the Eve of paintings from the Middle Ages and should therefore be considered as a promise of paradise!
The true Story
But everything written above is only part of the story…
Putting aside colonialism and the encounter between two civilizations, which started badly (because one felt themselves superior to the other), the real story of the mission dress and the bikini is tied in to one simple and now confirmed fact:
Global warming!
Miriam Schwamm
New Caledonia
May 2010
Traduction en anglais avec le concours de l'ADCK, traductrice: Jane Jore
23:20 Écrit par Miriam Schwamm dans Installations | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : robe mission, installation, centre culturel tjibaou, art, artistes, thierry fontaine, nouvelle-calédonie | Facebook | |
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